Herevini Taupua-Degage est auditeur financier international. Basée à Londres, elle voyage aux quatre coins du globe pour vérifier que l’argent attribué aux entités réceptrices (dont les ONG) par des bailleurs de fonds comme l’Union européenne ou l’ONU est utilisé à bon escient. Après une pause de quelques mois au fenua, elle se prépare à repartir vers de nouvelles aventures.
Comment es-tu devenue auditeur financier international ?
«Après mon bac, je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. Je suis partie à Montpellier faire une licence éco-gestion, mais ça ne m’a pas vraiment plu. Donc je suis montée sur Paris faire une école de commerce et je suis tombée sur une prof de comptabilité avec qui j’avais bien accroché. J’étais assez douée, mais j’étais aussi sûre de ne pas vouloir être comptable. Par contre, vérifier les comptes, ça me disait bien. À partir de là, je savais que je voulais être auditeur financier. Donc j’ai fait un master en audit et expertise comptable et je me suis lancée. Je suis partie au Canada, mais je n’ai pas pu y exercer, ni en tant que comptable ni en tant qu’auditeur parce que je n’avais pas le diplôme d’expert-comptable.
En France, pour être auditeur, il te suffit d’avoir un bac +5, mais dans les pays anglophones, il te faut le diplôme d’expert-comptable (l’équivalent d’un bac+8 en France). Du coup, je suis retournée en Europe m’installer en Angleterre, où je n’avais jamais mis les pieds. C’était vraiment un pari. Et parce que l’Angleterre est proche de la France, ils comprennent le système LMD. Ils ont reconnu mon master et ils m’ont pris sous leur aile. C’est comme ça que je suis devenue auditeur interne au British Council. C’était une mission d’un mois qui a fini par durer 3 ans. Je me suis fait débaucher par un cabinet d’audit externe qui s’appelait Moore Stephens LLP, et qui est devenu BDO LLP après une fusion en 2019. Ils étaient et sont toujours leader sur le marché de l’audit des bailleurs de fonds. Ce cabinet était venu auditer le British Council et l’un des associés m’a proposé de travailler pour eux à l’échelle internationale. J’ai sauté sur l’occasion ! J’ai travaillé chez eux de 2013 à 2022, ensuite j’ai démissionné pour me mettre à mon compte. »
En quoi consiste exactement ton travail ?
« Mon travail consiste à vérifier que l’agent public qui a été donné aux entités réceptrices (généralement des ONG, mais pas que) a été utilisé à bon escient. Ces entités doivent transmettre aux bailleurs de fonds un rapport financier et les bailleurs de fonds décident ensuite quelle entité va être auditée. Lorsqu’une entité est sélectionnée pour un audit, le cabinet que je représente va sur place et par rapport au bilan financier qu’ils ont fourni, je demande les justificatifs. Je fais une sélection de ce que j’ai envie de vérifier et je regarde les justificatifs pour voir s’ils ont bien dépensé l’argent qui leur a été confié. »
Ton travail t’a menée jusqu’où dans le monde ?
« J’ai fait presque cent pays, je suis à quatre-vingt-dix-huit ! Oui je les compte, j’ai une liste parce que je trouve ça intéressant de savoir combien j’en ai fait sur les cent quatre-vingt-dix-sept qui existent selon l’ONU. J’ai fait dix-sept pays en Afrique : Niger, Liberia, Tanzanie, Ouganda, Afrique du Sud, Botswana, Kenya, Malawi pour n’en citer que certains. J’ai fait la plupart des pays d’Europe. J’ai fait une grande partie de l’Asie aussi : le Japon, Hong Kong, Vietnam, Thaïlande, la Birmanie, Cambodge, plusieurs fois la Malaisie. J’ai fait plusieurs pays du Pacifique, dont notamment Fidji très régulièrement, la Nouvelle-Calédonie, Kiribati, Samoa, Tonga, Papouasie Nouvelle-Guinée. J’ai fait les pays en guerre…
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