Selon la mythologie polynésienne, Hina, avec Ti’i, est –après la création du monde de Ta’aroa– à l’origine de la création des premiers êtres humains. Et après avoir exploré la Terre avec son frère Rū, Hina-i-faauru-vaa (Hina qui veille sur les pirogues) ne perdit pas son goût des explorations. Bien au contraire, elle était impatiente de repartir à l’aventure.
Aussi, un soir que la lune se nommait Hotu et était pleine, elle prit sa pirogue pour aller lui rendre visite. Une fois arrivée au plus proche de l’astre, la lune lui plut tellement qu’elle abandonna sa pirogue à la merci des flots qui l’engloutirent. C’est ainsi que Hina-i-faauru-vaa devint Hina-i-aa-te-marama (Hina qui pénétra dans la lune) et elle demeura à jamais dans la lune. Elle ne cessa pour cela de rester en sympathie avec son frère, en poursuivant ses voyages à travers les îles et continua chaque nuit à veiller sur les navigateurs, les protégeant durant leurs périples. Elle prit alors le nom de Hina-nui-te-araara (Grande Hina qui veille), bien que généralement, le nom de Hina-i-aa-te-marama resta le plus utilisé.
Les taches sombres recouvrant la face visible de la lune étaient, selon la croyance, de somptueux ‘ōrā (banians) dont les nombreuses branches fournissaient à Hina de l’écorce afin qu’elle prépare du tapa pour les dieux. C’est ainsi qu’on l’appela Hina-tutu-ha’a (Hina la batteuse de tapa) et sur Terre, elle était l’inspiratrice des batteurs de tapa sacrés qui s’efforçaient d’égaler son talent artistique.
Car un autre soir de pleine lune, alors que Hina se trouvait dans le banian de la lune, elle brisa une branche avec son pied qui tomba dans l’espace et finit par atterrir à Ōpoa, sur l’île de Ra’iātea, où elle prit racine. Ce fut le premier ‘ōrā dans le monde, sur nos îles. Cet arbre magnifique, dont le tronc s’évase en forme de table, est si large que depuis des temps immémoriaux, les gens ont l’habitude d’y placer leurs pē’ue pour converser et s’y reposer.
Depuis, il est dit que si l’on entrevoit un espace clair sur la face visible de la lune, c’est l’endroit où se trouvait la branche dudit ‘ōrā et c’est là qu’habitait Hina sous son arbre. Son compagnon était un ‘ū’upa, le pigeon vert sauvage, qui demeurait dans l’arbre, se nourrissant de ses petites figues dont il apporta quelques fruits sur Terre. Il répandit les graines de la façon suivante : le ‘ū’upa avait un jour un paquet de figues dans le bec lorsque, très haut dans l’espace, il rencontra un ‘ōtaha (frégate) qui voulut se saisir des figues et ainsi s’approprier les mérites de les avoir apportées sur Terre. Mais grâce à la protection de Hina, le ‘ū’upa put conserver son fardeau et continuer sa route. Une fois près de la Terre, il éparpilla les fruits qui donnèrent naissance aux premiers banians dans le reste de nos îles.
Cette légende nous permet de comprendre plusieurs aspects importants pour les anciens Polynésiens. Car souvenez-vous que les mythes et les légendes sont contés pour nous indiquer certains mystères, certaines pratiques ou encore usages du quotidien. La légende de Hina que nous venons de découvrir positionne la lune comme un élément primordial pour nos ancêtres, mais aussi à l’heure actuelle. Car en effet, pendant une pleine lune, la sève circule plus fortement et plus abondamment dans la plante, tandis qu’elle devient plus lente et plus rare lorsque la lune entre dans sa phase descendante. Résultat de la force d’attraction gravitationnelle qui, à l’inverse, favorise la présence de sève dans les racines. Ainsi, les batteurs de tapa ont un repère dans le temps pour savoir quel jour ou quelle nuit sera plus propice à la confection des étoffes.
Sources :
Légende racontée par Vairea Teissier, documentaliste au Musée de Tahiti et des îles ; Tahiti aux temps anciens, Teuira Henry, pp. 482 à 483.
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