Les chants polyphoniques polynésiens vont à nouveau résonner sur To’atā durant les soirées de concours du Heiva i Tahiti. Uniques au monde, les Polynésiens sont les seuls à pouvoir entonner ces chants, une spécificité qui est une grande fierté pour Mā Zinguerlet et Dayna Tavaearii, qui racontent leur passion et leur parcours. Primées plusieurs fois au Heiva, membre du jury, elles ont toutes les deux appris à l’Église protestante mā’ohi. Attention, ça commence. Tahi, rua, toru… !
Mā Zinguerlet
« J’ai vécu le chant traditionnel avec mes grands-parents, sur l’île de Raiatea. C’était obligatoire à la maison. Mes grands-parents étaient de grands pratiquants chez les protestants et je devais assister aux répétitions des chants choisis pour le culte du dimanche. C’était souvent des tārava, des rū’au, des hīmene tuki… À l’époque, j’avais 9 ou 10 ans, j’avais mieux à faire que d’aller chanter ! Ça m’énervait ! Jusqu’au jour où j’ai fait la têtue et je suis allée jouer à cache-cache avec les copains qui étaient aussi venus à la répétition. Ma grand-mère m’a fait signe de loin et là elle m’a disputée devant tout le monde, elle m’a assise de force dans le groupe de chant : “Maintenant, chante, vas-y !” Et ça a marché. Ça m’a beaucoup marquée. À partir de ce moment-là, les notions, les notes, les tonalités, les voix, les mélodies, tout est rentré dans ma tête ! J’ai pris conscience que mes grands-parents voulaient simplement m’enseigner le chant traditionnel. Quand je les ai perdus, car ils sont décédés tous les deux, j’ai regretté de ne plus les entendre chanter avec moi. Cet enseignement, pas comme les autres, m’a poussée à continuer. Mes grands-parents me disaient que nous étions une famille de grands chanteurs et il fallait continuer… »
Dayna Tavaearii
« Cette année, je suis membre du jury au Heiva i Tahiti, c’est la troisième fois. J’ai participé au Heiva à la fin des années 1990 et je me suis arrêtée. J’ai été primée en chant, mais dans un groupe de danse où je faisais partie de l’orchestre, j’étais dans la chorale, et j’ai eu le troisième prix en ‘ūtē paripari. Je suis revenue en 2006 avec mon groupe Ui Api de Arue. Le but était d’avoir des fonds pour rebâtir notre temple. On m’a choisie pour faire le ra’atira. On a reçu les premiers prix en tārava Tahiti et en hīmene rū’au. En 2007, troisième prix en tārava Tahiti ; en 2008, premiers prix en ‘ūtē paripari et en hīmene rū’au et meilleur ra’atira. Je suis ensuite allée aider un groupe de Moorea qui a également été primé en tārava Tahiti en 2015, puis en 2017 et 2018, j’ai accompagné le groupe des Sanitos, Natiara. Ils voulaient apprendre et participer au Heiva. La majorité des participants ne connaissait pas ces chants traditionnels. Ça a mis du temps. C’est du travail d’enseigner, mais quand la passion est là, c’est un plaisir de partager ça… »
Article rédigé par Lucie Rabréaud
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