Tous sont fascinés, certains amoureux, d’autres effrayés, mais toujours prêts à l’affronter. La vague de Teahupo’o est une force de la nature, mystique, spirituelle, sportive. Tim McKenna a passé près de 30 ans à la photographier. Elle et ceux qui osent la défier.
La « Millennium Wave », cette photo de Laird Hamilton prise en l’an 2000 par Tim McKenna, lors d’un épisode de houle, est restée dans tous les esprits des amoureux du surf. Elle fait la Une de Surfer Magazine avec ces mots : « Oh my god! » Et elle va changer des vies. Laird Hamilton, qui souhaite « chevaucher de grosses vagues sans emprunter la voie de la compétition », se trouve « pleinement intégré à la communauté de surfeurs » grâce à cette photo. Alors qu’il se sentait « souvent en marge du monde du surf ». Pour lui, la vague de Teahupo’o devenait un « challenge unique ». Tim McKenna y trouve l’inspiration. Il a commencé à y travailler en 1997, année de la première compétition. Et il y revient chaque année car il pressent le potentiel incroyable de cette vague pour finalement s’installer à Tahiti pour ne plus rien rater des houles et des « moments magiques ».
Teahupo’o est au cœur de nombreuses légendes et la vague ne cesse de fasciner, que ce soit de simples amateurs ou des professionnels qui en ont fait leur terrain de jeu. L’auteur, Ingrid Astier, la qualifie tantôt de « monstre », de « divinité », de « mâchoire écumeuse », de « nirvana », de « diable vêtu d’écume »… Bref, pour la chevaucher, ne faut-il pas être un « demi-dieu », s’interroge-t-elle. Quand elle est « bien fat » cette vague écrase des tonnes d’eau sur un platier aussi dur que du béton… De quoi effectivement éprouver son courage. Pour Matehau Tetopata, c’est son amoureuse. Il veut tout le temps être avec elle, il lui parle. Dans son livre, Tim McKenna rend hommage à ceux qui osent y aller, ceux qui l’ont presque apprivoisée, ceux qui continuent d’en avoir peur, ceux qui s’y affirment sans complexe, stoïques. Mais aussi à toute cette nature vibrante et sauvage : la lune pleine et rose qui se reflète dans les nuages, les montagnes effilées par le soleil, l’écume dont les embruns effacent le paysage, cet arrondi si parfait, si abrupt. Et quand soudain c’est un code rouge, les mots ne suffisent plus. Comme cette session de novembre 2007, dont le Hawaiien Garrett McNamara se souvient parfaitement : « Affronter une houle de sud en novembre, bien après la fin de l’hiver austral, conférait à cette session une ambiance surréaliste. Tout semblait différent, inquiétant. L’eau et le ciel étaient plus sombres, les courants et le vent plus puissants… Comme si nous avions pénétré par accident dans une autre dimension. » Teahupo’o met à l’épreuve ce que l’on croit savoir ou connaitre de la réalité et laisse un souvenir étrange. Des attentes de plusieurs heures pour un ride de quelques secondes qui resteront dans l’histoire. Les photos et les textes de ce livre permettent d’avoir une trace, de s’assurer que oui, elle existe vraiment.
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